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samedi 17 mai 2008

Le coup de gueule du renard

Lettre de Goupil (et de son copain bien caché, le blaireau)
au Pic Vert d’Éragny.
« Non, je ne suis pas un nuisible ! »



Connaissez-vous le déterrage ? On appelle ça aussi de la vénerie souterraine! La « vénerie sous terre » se pratique toute l’année, y compris en période de gestation des femelles!

Le déterrage a pour principe d’acculer un animal au fond de son terrier à l’aide de chiens. Ensuite un équipage creuse à l’aide de pelles et de pioches la galerie concernée afin de pouvoir attraper l’animal à l’aide de pinces, puis de le mettre à mort ou, plus rarement, le relâcher à distance de son lieu de capture. Cela en pleine période de reproduction ! Les adeptes de ce « sport », viril et sanguinolent, peuvent même participer à un championnat de France !

Les 16, 17 et 18 mai 2008 a été programmé en Bourgogne, à Cluny (Saône et Loire), dans le cadre d’une « Fête de la chasse », un « championnat de France » de déterrage. Il s’agit d’un concours de chiens de chasse, (souvent des Jack Russel terriers ) dont les « cibles » sont des animaux sauvages, en particulier des blaireaux.

Il m’arrive de partager le terrier d’un blaireau. Nous partageons aussi, parfois avec le ragondin, ces moments de stress et de mort que nous réserve le prédateur des prédateurs : l’homme. L’animal prédateur tue, en général pour manger. L’homme, lui, ne tue pas que pour manger. Il tue pour son plaisir. Parfois de façon ignoble, patiente et raffinée. Il apprend sans doute, sur nous, ce qu’il fait à ses congénères, pendant les guerres !


Chasser un renard sous terre prend de 5 minutes à 5 heures. Un blaireau, beaucoup plus ! Mon frère est plus gros, mieux armé contre les chiens et creuse plus profond. La chasse au blaireau est la chasse des puristes paraît-il ! Dans nos garennes, ce n’est pas si facile de nous déloger.

Aux dernières nouvelles, le déterrage se pratiquerait aussi dans le Vexin ! Comment justifier une chasse « concours » pendant la fermeture générale de la chasse, quand les espèces se reproduisent et que la meilleure chose à faire serait de les laisser tranquilles ? Le déterrage ne doit pas être considéré comme une « activité sportive ». Rien ne justifie, en effet, d’intervenir sur une espèce patrimoniale peu prolifique à une période clé de son cycle biologique.

Quant à nous, les renards, on recommence à nous dire porteurs de maladies pour mieux nous livrer aux chasseurs (qui ne supportent pas qu’on croque ne fut-ce qu’une toute petite partie de leur gibier)! En réalité, je mange surtout des mulots, et le blaireau se nourrit essentiellement de vers de terre, insectes, mollusques, micro-mammifères, fruits et tubercules.

À Champs sur Marne, des habitants, inquiets de nos sorties nocturnes, ont demandé à la mairie, que des piégeurs éradiquent toute présence de « nuisibles » dans la commune. À quand notre tour à Éragny sur Oise ?

La Ligue ROC, Ancienne Ligue des opposants à la chasse, présidée par Hubert Reeves, cherche bien à nous défendre . En vain. Si la chasse à courre au renard est interdite en Grande Bretagne, si le blaireau est protégé en Grande-Bretagne, Italie, Irlande, Espagne, Grèce, Belgique, Pays-Bas et au Luxembourg, ce n’est pas le cas en France.

L’ASPAS (Association pour la Protection des Animaux Sauvages ) et le RAC (Rassemblement Anti Chasse) tirent la sonnette d’alarme à l’heure où un bilan préoccupant sur la biodiversité française a été dressé à l’occasion du Grenelle de l’Environnement.

Rien n’y fait. Le déterrage est légal. Le blaireau est une espèce gibier et non nuisible en France. Sa chasse est donc autorisée par tir (au fusil) et par vénerie (chasse sous terre). La période d’exercice du déterrage débute le 15 septembre et s’achève le 15 janvier. Néanmoins, le préfet peut autoriser la vénerie du blaireau pour une période complémentaire à partir du 15 mai jusqu’au 15 septembre. En conclusion, le blaireau peut faire l’objet de destruction légale presque toute l’année.

Je suis classé « nuisible » partout en France ou à peu près. Le terme nuisible, appliqué à la faune sauvage, à une signification très précise. Il s’agit des espèces qui figurent sur la liste nationale fixée par le décret N° 88-940 du 30 septembre 1988. Tous les scientifiques ont banni le terme « nuisible » de leur vocabulaire. La biologie, l’éthologie (étude du comportement animal), l’écologie l’ont prouvé : chaque espèce a sa place et un rôle au sein de l’éco-système et des équilibres naturels. Et pourtant, on me tire, on me piège, on me déterre.

La France parle d’écologie mais ne change rien à ses pratiques moyennageuses. Moi, Goupil, j’ai peur ! Ce n’est pas ma faute si je suis un carnivore, et je mange d’ailleurs beaucoup moins de viande que les omnivores ! Si je n’ai pas d’amis et de défenseurs parmi les hommes, on me fera disparaître comme l’ours, le loup, ou le lynx. Au secours !

Pour Goupil : Jean-Pierre Dacheux et Alain Frédéric.

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