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dimanche 9 mars 2008

N'oubliez pas le méthane !

Le combat contre le réchauffement de la planète ne se réduit pas au gaz carbonique, rappellent trois scientifiques dans le mensuel La Recherche de mars 2008.

Plusieurs gaz ont, dans l'atmosphère, un effet de serre, c'est-à-dire la capacité d'absorber le rayonnement infrarouge émis par la Terre, et donc de la réchauffer. Il s'agit principalement du gaz carbonique (CO2), du méthane (CH4) et du protoxyde d'azote.

Afin de trouver une unité commune mesurant le potentiel de réchauffement global (PRG) de chacun, le GIEC a calculé, en 1995, l'équivalent en CO2 des autres gaz à effet de serre. Il a établi qu'une molécule de CH4 avait, un siècle après son émission, un pouvoir radiatif 25 fois plus élevé qu'une molécule de CO2.

Ceci vaut pour un horizon de cent ans. Mais si le délai raccourcit, le PRG du méthane croît. En effet, CO2 et CH4 n'ont pas la même durée de résidence dans l'atmosphère. Ainsi, la durée efficace du méthane est d'une dizaine d'années, celle du gaz carbonique de plus d'un siècle. Cela signifie que le méthane exerce l'essentiel de son pouvoir calorifique dans les premières années suivant son émission, alors que celui du gaz carbonique sera réparti tout au long d'un siècle.

Autrement dit, le potentiel de réchauffement du méthane est très élevé au début (une molécule de CH4 équivaut à 90 molécules de CO2 dix ans après son émission), fort au bout de quarante ans (49) et ne retrouve la valeur calculée par le GIEC (25) qu'au bout de cent ans.

À l'échéance de 2050, le PRG du méthane est de 49 fois celui du CO2 et non plus 25. Par conséquent, réduire les émissions de méthane peut avoir un effet deux fois plus important que ne le pensent généralement les décideurs. Pourtant, l'effet du méthane est minoré quand il n'est pas purement oublié. Ainsi, les travaux du Grenelle de l'environnement ne le mentionnent-ils pas.

Les retombées de ce nouveau regard sur le rôle du méthane peuvent déjà être envisagées. En effet, explique Benjamin Dessus, ce gaz est essentiellement émis par l'agriculture (notamment par les ruminants), la décomposition des ordures ménagères et du lisier provenant de l'élevage, et des fuites dans l'exploitation des combustibles fossiles. S'il est difficile d'agir sur les ruminants, les autres sources sont plus contrôlables, à un coût limité.

Benjamin Dessus et Bernard Laponche montrent que récupérer les gaz des ordures ménagères en France aurait un effet équivalent à celui de la construction de quatre réacteurs nucléaires EPR ou que la réhabilitation de 400 000 logements anciens par an pendant vingt-cinq ans.

Dans les pays émergents aussi, la prise en compte du méthane est importante. "Dans le tiers-monde, observe M. Dessus (3), il y a plus d'émissions de méthane que de gaz carbonique : ces pays sont plus agricoles et moins industrialisés. Ils vont se développer, donc il y aura plus de CO2 ; mais il n'est pas inéluctable qu'ils émettent plus de méthane." Dans l'énergie comme dans les décharges d'ordures, le méthane est en effet récupérable à coût modeste, d'autant qu'il constitue lui-même une source d'énergie valorisable. (1)

Le méthane engendre un peu plus de 15% de l'effet de serre anthropique rappelle Jean-Marc Jancovici. Le méthane est un gaz qui se forme dès qu'un composé organique (un reste d'animal ou de plante) se décompose à l'abri de l'oxygène de l'air (par fermentation ou putréfaction), par exemple au fond de l'eau ou sous terre. Les réserves de gaz naturel ne se sont pas formées autrement que par la décomposition, il y a très longtemps, de plantes et d'animaux, qui se sont d'abord transformés en hydrocarbures liquides, puis en gaz. Une partie du méthane présent dans l'atmosphère est donc d'origine parfaitement naturelle, provenant notamment des zones humides (marécages, marais, etc) et...des termites !

Mais l'homme y rajoute sa part. Le méthane d'origine humaine provient :

- pour une part de la combustion de matière organique, notamment des brûlis en zone tropicale (la combustion du bois est toujours une combustion imparfaite, qui libère dans l'atmosphère des composés mal ou pas brûlés, dont du méthane),

- de l'élevage des ruminants (vaches, moutons, chèvres, yaks...), car les aliments qu'ils ingèrent fermentent dans leur estomac, en dégageant du méthane (à titre informatif il y a environ 20 millions de bovins en France : le poids des vaches est supérieur au poids des hommes !),

- de la culture du riz, car les zones humides en général émettent du méthane (ce gaz se forme dès que des composés organiques se décomposent - "pourrissent" - à l'abri de l'oxygène de l'air, comme par exemple au fond des marécages, ou encore dans les sédiments océaniques),

- des décharges d'ordures ménagères (encore le "pourrissement" à l'abri de l'oxygène de l'air),

- des exploitations pétrolières et gazières, à cause des fuites de gaz (le méthane est le principal constituant du gaz naturel), et des mines de charbon (le méthane est le principal constituant du grisou). (2)

Sources :
(1) Hervé Kempf . http://www.lemonde.fr/sciences-et-environnement/article/2008/03/05/
(2) Jean-Marc Jancovici. http://www.manicore.com/documentation/serre/gaz.html
(3)
Benjamin Dessus.
Ingénieur et économiste, il préside l'association Global Chance qui regroupe des experts indépendants sur l'énergie et l'environnement.
http://www.global-chance.org/spip.php?article83#larecherche

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